Une forme de vie, Amélie Nothomb


Le dernier roman d’Amélie Nothomb est sorti il y a peu de temps, et comme d’habitude, je n’ai pas pu résister.
Je l’ai littéralement dévoré, en quelques heures à peine ! Une forme de vie est désormais un de mes livres préférés et il est certain que je vais le relire plusieurs fois !

° L’histoire (quatrième de couverture) :

« Ce matin-là, je reçus une lettre d’un genre nouveau ».

9782226215178FS

° Mon avis :

Un très beau roman !
L’auteur se livre bien plus que d’habitude, et le lecteur a la sensation d’en apprendre davantage. Parfois sur le ton de la confidence, parfois avec humour, mais Amélie Nothomb se livre à son lecteur d’une façon exceptionnelle, et c’est peut-être pour cette raison que ce livre m’a autant touché.
Il traite également de thèmes qui sont chers à mon cœur comme les problèmes de poids (obésité, boulimie, anorexie), la correspondance ou tout simplement la lecture.

A travers son roman, Amélie Nothomb nous montre qu’il faut croire en ses idéaux «Avant mes 30 ans, j’avais des idéaux, des rêves, et j’ai essayé de les atteindre» (Page 21).

Bien sûr, le personnage de Melvin Mapple est extrêmement intéressant, et très réussi ! Au début du roman, il explique à Amélie qu’il s’enrôle dans l’armée pour ne plus mourir de faim. Mais au fil du temps, terrorisé par ce qu’il vit au quotidien, en Irak, son envie de manger se voit décuplée. Tout doucement, il devient boulimique.
La boulimie est décrite d’une façon si réelle et si touchante, et les phrases de l’auteur vous feront forcément réfléchir :

«On ne peut pas dire qu’on aime manger comme ça, c’est plus fort que nous, on pourrait se tuer de nourriture, c’est peut-être ce qu’on cherche» (Page 28), «Et puis ce n’est pas notre corps. Cette histoire arrive au corps de quelqu’un d’autre. Cette nourriture, nous la balançons dans le ventre d’un inconnu. La preuve, c’est que nous le sentons de moins en moins. Ça nous permet d’en avaler plus. Ce que nous éprouvons n’est pas du plaisir, mais un affreux réconfort» (Page 29).
En effet, pour combler le vide intérieur qu’il ressent, Melvin Mapple mange à outrance, encore et encore, il n’en a jamais assez, il n’est jamais assez rassasié. La nourriture devient sa drogue  (Page 37) : «La bouffe, c’est notre drogue, notre soupape, nous ne voulons pas la perdre» (Page 44).
La crise de boulimie et la souffrance qu’elle engendre est vraiment décrite avec brillo, et j’en ai été très touchée.

Pourtant, l’obésité serait une forme de suicide (Page 38) : «Il faut manger pour vivre, paraît-il. Nous, nous mangeons pour mourir» (Page 38).

Amélie Nothomb s’interroge également sur l’après obésité, à savoir : comment sortir de cet engrenage ? La boulimie empêche bien souvent les intéressés de maigrir et de se tenir à régime, tel qu’il soit.
Melvin écrit à Amélie, notamment parce que d’après lui, dans ses livres, Amélie ne montre pas les obèses comme des gens sans dignité (Page 30).

Melvin s’invente d’ailleurs des légendes pour mieux survivre, pour mieux supporter l’intolérable. Il explique ainsi à Amélie que dans ces kilos en trop, que dans sa graisse, une femme est lovée contre lui. Mais qui n’a jamais imaginé des scènes pour mieux sortir la tête de l’eau ?

L’auteur continue à réfléchir sur l’obésité et nous fait part de nombreuses réflexions intéressantes. Elle se pose par exemple la question suivante : «Un corps obèse est-il vivant ?»  (Page 34).
Voici la réponse de l’auteur : «La seule preuve qu’il n’est pas mort, c’est qu’il grossit encore» (Page 34).

Amélie Nothomb s’intéresse également au regard des autres sur les personnes obèses, et le constat est édifiant : leur regard est blessant et terrifiant : «Je n’ai pas dit aux miens que j’avais pris plus de 100 kilos, leur réaction me terrifie» (Page 39). Les obèses sont en effet souvent vus comme des «boucliers humains» (Pages 35-36) par les autres personnes.
Les personnes ne voient pas les personnes obèses comme des personnes malades, et Amélie Nothomb le dénonce avec force. Les personnes obèses ne sont pas des gens trop bien portants, ils sont bel et bien malades ! (Page 36). «Je suis incapable de me mettre au régime» (Page 39) déclare Melvin Mapple.
N’oublions pas non plus que les personnes obèses rencontrent de nombreux problèmes au quotidien : par exemple, ils ont beaucoup de mal à se déplacer.

Mais Amélie Nothomb ne s’arrête pas là. Elle nous fait aussi réfléchir sur la diplomatie : serait-on plus diplomate à l’écrit ? Amélie traite également du genre épistolaire, une forme si particulière d’écrits (page 92).
Elle s’interroge aussi sur le rôle d’un écrivain : doit-il aider l’autre à améliorer son existence, et comment ?

L’auteur n’a pas oublié de glisser de nombreuses touches d’humour dans son roman, comme par exemple le fait qu’une enseignante lui écrive une lettre en lui demandant de corriger les copies de ses élèves (copies sur un roman de l’écrivain, bien entendu – et fait véridique, selon les dires de l’auteur) (Page 89).

Amélie Nothomb traite aussi des relations et des frontières que l’on peut mettre entre ses relations : «Être en relation avec qui que ce soit pose des problèmes» (Page 119).

L’amitié, qui est très précieuse à mes yeux, est également décrite par l’auteur d’une façon très juste : «On accepte les nouveaux amis sans oublier ceux qui sont entrés dans le silence. Personne ne remplace personne» (Page 124).

Une réflexion de l’auteur sur le langage a également retenu mon attention «Le langage est pour moi le plus haut degré de réalité» (Page 165), et pour vous, qu’en est-il ?

Enfin, je souhaiterais terminer ma chronique avec une citation d’Amélie sur la lecture, car je la trouve remarquable :
«La lecture permet de découvrir l’autre en conservant cette profondeur que l’on a uniquement quand on est seul» (Page 109).

Je ne vous dévoilerais pas la fin du livre, mais tout ce que je peux vous dire, c’est que la dernière page, et surtout le dernier paragraphe, est une vraie petite merveille.

Bref, vous l’aurez compris, je vous recommande vivement la lecture de ce roman, qui est tout simplement extraordinaire !

 Je vous laisse avec ces quelques questions :

– Avez-vous lu ce livre ?
– Que pensez-vous du phénomène de l’obésité ? Pourquoi certains sont-ils si cruels avec ces personnes ?
– Pensez-vous que l’on soit plus diplomate par écrit ?
– Pour vous, quel est le rôle d’un écrivain ?
– Enfin, « faut-il rencontrer les écrivains ? » (Page 108)

Laisser un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

4 commentaires sur “Une forme de vie, Amélie Nothomb

  1. J’adore Amélie Nothomb mais je n’ai pas encore pris le temps d’aller acheter celui-ci. Mais ton commentaire me donne envie de filer chez le libraire !

  2. Je constate que je ne suis pas seul à  être un dévoreur nothombien!

     

    Car ce roman se révèle vraiment excellent!

  3. Merci pour cet article très fourni, tout ça me donne envie de m’attaquer au dernier roman d’Amélie Nothomb… J’espère qu’il ne tardera pas trop à sortir en poche, car seul le prix m’effraye
    encore.

    Bonne continuation 😉 Et au plaisir de vous relire.

  4. Je me permets de répondre aux quelques questions de fin d’article… Mais tout d’abord, bravo pour cette splendide chronique, parfaite en tout point!

    – Avez-vous lu ce livre ?

    Oui, je l’ai terminé ce week-end.

    – Que pensez-vous du phénomène de l’obésité ? Pourquoi certains sont-ils si cruels avec ces
    personnes ?

    Faisant partie de « ces personnes », je ne sais que répondre à cette question. Je pense que tout d’abord c’est la différence
    qui fait peur. L’obésité n’est pas toujours au point de ce que décrit Amélie Nothomb dans son livre, donc les réactions ne sont pas toujours aussi excessives, néanmoins l’être humain est ainsi
    fait que ce qui ne « rentre pas dans le moule » l’effraie… et l’obèse ne rentre dans aucun moule, même au sens propre.

    – Pensez-vous que l’on soit plus diplomate par écrit ?

    Oui. On réagit moins « à chaud », on peut se relire. On peut évaluer l’effet de son texte à postériori, alors qu’oralement,
    ce qui est dit, est dit.

    – Pour vous, quel est le rôle d’un écrivain ?

    Faire son métier, le mieux possible. L’écrivain n’a aucune vocation « sociale » par son travail. Chaque personne est
    différente.

    – Enfin, « faut-il rencontrer les écrivains ?

    Pourquoi pas? C’est toujours intéressant de rencontrer une personne!